Envier les Vivants // INTENABLE

couverture intenable envier les vivants

LABELS : Guerrilla Asso // Fireflies Fall

De nombreuses années sont passées depuis Nina’school et leur premier album « Du bruit dans la tête », et c’est finalement avec « envier les vivants » tout juste sorti, qu’intenable approche le plus de leur formation initiale.
Pourtant, le désormais quatro s’éloigne plus que jamais de tous leurs efforts précédents, en prenant une multitude de risques qui finalement forment une agréable surprise.
Ceux-ci leur façonnent désormais une identité encore plus originale, réelle force créatrice d’un album  rassembleur faisant naître de nombreuses questionnements aux auditeurs au fur et à mesure de son écoute grâce à des textes bien construits et une musique tout autant remplie d’émotions pour les illustrer.

«J’ai écouté un peu et j’aime bien malgré le chant Français », voilà ce que m’a répondu un cher monsieur suite à mon tweet enjoué, le sollicitant à canaliser son attention auditive sur cet album quelques instants.
Je tiens à préciser ici que je n’ai pas été entièrement satisfait de sa réponse, et que d’ailleurs cette personne ne semble pas au courant que nos échanges se déroulaient sur le réseau social de la haine, et que je me suis fortement abstenu de répondre à son « un peu » avec un bonhomme au visage rouge vif et que j’ai même hésité avec celui qui a de la fumée qui semble sortir de trous de nez non existants ! Mes doigts ne sont peut être pas passés à l’action, mais sache que sur le moment, mon visage ressemblait à s’y méprendre à un joli lot d’émoticônes.

Plus sincèrement, ce témoignage en dit long sur ce qu’Intenable nous propose et l’impact de leur musique avec leur grand retour :
On s’attache assez rapidement aux morceaux, et les mots ici scandés ont souvent une résonance particulière. Une grande sensibilité en découle, jusque dans les accords mineurs qui se succèdent avec une beauté qui j’en suis persuadé ira malheureusement jusqu’à discriminer les riffs d’ailleurs.
Tout ça créé bel et bien un contenu qui pourra être apprécié par tous types d’auditeurs, du fan de rock chanté dans notre langue aux amateurs des groupes ricains plus énervés, chaque personne arrêtée subitement sur ces pistes y trouvera un élément qu’il pourra juger intéressant et en deviendra inévitablement curieux.

« L époque » piste d’ouverture très convaincante est déjà parfaite pour illustrer ces propos, dans l’ensemble de son contenu :

« Ressens comme la terre tremble,
La nuit n’est éclairée que par la volte et ses lueurs.
Vois leurs figures se tendre
Sous des pavés trop dignes, le vacarme des clameurs.

Et si au matin des corps tombent,
S’il n’y a plus d’étincelles,
S’il reste juste une fumée sombre,
Les prochaines flammes seront plus belles. »

« Une cravate ou une corde »  et « nuées ardentes » se succèdent , formant alors avec le premier morceau évoqué une excuse pour vite nous replonger dans les albums précédents « quatrième mur » et « la cour des grands »  une fois l’écoute de celui-ci terminée : même ambiance, même charme, avec un goût de reviens-y encore plus présent.


Côté influences, « Le portrait de Marcel » nous transporte du côté de Toronto avec un petit côté PUP et une ressemblance avec des pistes comme « Mabu » ou bien « Dark days » dans sa rythmique.
« Silly Selma » revient quant à elle aux racines plus anciennes des membres du groupe au nom que-je-me-suis-promis-à-moi-même-de-ne-pas-trop-prononcer-ici : Du coup, un petit zest de NOFX vient pimenter tout ça, avec des  guitares lead qui semblent tirer leurs origines des doigts d’El Hefe et une batterie galopante comme il faut.

L’étonnement arrive avec « ensemble, en cendres » qui propose un facette du groupe qui était jusqu’ici inconnue, beaucoup plus rock et planante. Avec toute sincérité, j’ai été scotché dès la première écoute, et je m’étonne moi-même du résultat : voilà ma petite préférence parmi ces 12 titres.
J’espère maintenant que le futur nous offrira plus  d’opportunités rattachés à cette direction, ainsi qu’à celle adoptée pour clôturer l’album avec « Mer Morte ».

La piste 10  est également un moment fort,  avec les deux minutes qui ne sont même pas effleurées : à l’instar de Selma à qui on supplie de laisser de côté ses méfiances, de celle qui  parlait à personne, ou encore de celui qui traverse toutes les rues à la recherche d’un travail, « Mono-tone » se lance dans une énumération de tranches de vie.
Une dimension beaucoup plus introspective est décrite avec des phrases apportées dans la hâte et sur le vif : « Je suis allé voir The Lighthouse, et j’ai voulu faire un fanzine. Une heure après j’y pensais plus.
Vendredi j’ai vu l’épilogue, c’était pas vraiment réjouissant, alors j’ai dit oui à ma sœur pour un repas de famille rassurant ».
Le refrain vient comme une note à soi-même, un rappel d’ondes positives face à la dépression qui est ici abordée.

 « Envier les vivants », qui ne pouvait pas mieux porter son nom, aborde un bon nombre des facettes sombres de notre société, revenant à son tour sur les classes sociales, les injustices qui en découlent, le monde déprimant du travail, la maladie mentale …
Ces sujets sont traités ici comme une réalité formant une situation malheureusement inévitable, et il est vrai que le « monde d’après » décrit par certains n’est probablement pas près d’arriver, mais tout en s’avouant les nombreuses failles du monde dans lequel nous vivons, un bon paquet de message positif vient nous nourrir d’espoirs :  L’essentiel se trouve dans les derniers mots prononcés « Tu vis encore ». A partir de là, tout reste possible.
Des mélodies en veux tu en voilà, une écriture soignée, cet album restera probablement gravé dans ma mémoire et demeurera rattaché à cette période si particulière, dans laquelle le plus beau et le plus misérable s’entremêlent quotidiennement.

— Arno

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