SPORT EST DE RETOUR – Petite interview

couverture SPORT retour

« On avait déjà dû dire 10 fois qu’on arrêtait, ça devenait presque une blague. Là je ne peux pas te dire qu’on rejouera ensemble. Ni qu’on ne rejouera pas d’ailleurs. »
La porte n’était pas totalement fermée, elle est restée  entrouverte ces quelques années.
C’est du moins ce que Flo m’avait confié avec ses mots, et ce qu’on pouvait interpréter dans cette interview par mail, consacrée à la séparation annoncée à l’époque et que vous pouvez retrouver également sur notre site : Interview – SPORT – HIWWAT
Je vous avoue que j’ai trouvé ça assez fun de me retrouver à faire la même demande d’interview auprès de SPORT, mais cette fois ci pour l’annonce de leur reformation.
Entre nous, on peut dire qu’on s’attendait déjà à ce que quelque chose arrive du côté du groupe, lorsque qu’il a fait sa première apparition sur Instagram, avec la création de son premier compte sur le réseau social à la fin septembre. C’est finalement le 4 décembre que SPORT annonce leur reformation, en précisant les projets concrets à venir : repartir sur les routes, et surtout, composer et enregistrer de nouveaux morceaux. On a forcément eu envie d’en savoir plus sur le sujet, de capter les motivations et la vision du groupe sur cette reformation. 

Il s’est montré difficile pour Flo et Nico de ne pas aborder le moment de la séparation à de nombreuses reprises. Même si j’ai pu évoquer le sujet, cet épisode derrière eux reste bien dans le sac à dos, et ces messieurs ne peuvent pas s’empêcher de ressortir cette expérience vécue également pour parler du présent, et même du futur. C’est un peu mamie qui sort les albums photos de la famille en ponctuant chaque image d’anecdotes et de comparaisons.
Après tout, c’est bien ce qui fait la différence avec SPORT, et qui fait que le mot « nostalgie » ressort quasiment inévitablement chez tout le monde en ce moment : C’est avant tout une aventure humaine. En discuter à travers des écrans n’a pas enlevé le côté chaleureux que j’attache inévitablement à SPORT.

« Quand on a arrêté, On était vraiment au bout d’un truc, on avait plus le désir de jouer. On s’est dit qu’on ne pouvait pas dire qu’on arrêtait si on arrêtait pas vraiment, et on s’était mis d’accord pour arrêter au moins 5 ans. »

Pendant ces quelques années, Flo arrête de jouer avec Monplaisir, pas si longtemps après la sortie de l’album « The Agreement ». Au moment du covid, la bande de potes se retrouve un peu « au fond du trou ». L’idée de tenter une nouvelle aventure arrive avec celle de louer un espace adapté à la création et à l’enregistrement. C’est ainsi que trois des membres de SPORT se retrouvent à jouer dans Viceprez, groupe aux sonorités bien éloignées et à enregistrer deux albums en un peu plus d’un an. Avant la création de cet autre projet mais aussi de son album plus ou moins solo «Atlantic », les différentes envies musicales de Nico pouvaient amener des désaccords au sein de SPORT, mais ses besoins sont désormais assouvis et l’identité musicale de SPORT restera donc bien intacte. 

Des tentatives de relancer la machine pour SPORT sont apparues avant ces 5 années évoquées, sans que ce ne soit pris véritablement au sérieux :


« On avait vraiment besoin de quitter SPORT, de laisser le truc en jachère et d’arrêter ce qu’on était en train de faire car on y arrivait plus à la fin. Quand t’as plus le désir, ça ne marche plus » précise Flo, avant que Nico ajoute :


« On avait le sentiment, en composant, qu’on avait plus rien à dire, que les morceaux ne se composaient plus, qu’on faisait que des choses qu’on avait déjà faites. »

Le groupe était bien conscient que les portes s’ouvraient à eux un peu partout dans le monde, mais la difficulté à se réinventer en fermait d’autres : « ce qui nous manquait c’était de faire comme ce qu’on est en train de faire ce week-end, c’est-à-dire se retrouver jouer de la gratte et faire des riffs ensemble. »

photo sport concert

Maintenant bien décidés à s’écouter sur l’instant présent, Nico précise un peu plus les motivations qui l’animent personnellement : «Y’a aussi peut être des trucs de vieillissement. Pour des raisons hypers intimes… Tu vois aussi des groupes avec des musiciens qui meurent, nous on est les quatre vivants, copains, qui se demandent pourquoi ils n’utiliseraient pas à nouveau le bon temps qu’ils passaient ensemble. Ça serait comme un luxe de ne pas l’utiliser ce truc, on peut se dire qu’on peut renouer avec ce qu’on était, avec le plaisir qu’on a de jouer ensemble. »
Croiser la route de RAIEN, un groupe italien qui a toujours influencé SPORT et qui se sont reformés, voir comment il se sentaient en traversant tout ça a aussi été un moment important. Revoir jouer ALGERNON CADWALLADER également. 

La motivation et l’envie n’a pas resurgi à moitié. L’idée de fêter les 10 ans de COLORS a été discuté, avec une tournée pour l’occasion. Le projet n’a finalement pas fait long feu, mais le groupe a été beaucoup plus loin. Précisant ne pas avoir eu envie de faire du « réchauffé », c’est la même maison utilisée pour les albums de Viceprez qui continue d’être utilisée pour des projets bien plus sérieux et concrets. Le retour de SPORT a commencé avec l’idée d’un morceau avant de discuter d’une réelle reformation, et ça discute désormais d’album. Trois/quatre concerts , et maintenant c’est plutôt trois ou quatre tournées.

 

La configuration est restée la même. Le batteur est revenu habiter à Lyon après avoir passé du temps en Bosnie, Nico vit à Annecy, Flo dans le Beaujolais et Nak en Allemagne.
L’alchimie au sein du groupe, pendant tout ce temps est restée intacte : « C’est cool de retrouver ses automatismes, en créant quelque chose de nouveau mais toujours avec un ADN qu’on connait très bien. Nos jeux de guitares sont hypers complémentaires, c’est hyper intéressant dans la structure et l’ADN de sport… on avait envie de revenir à ça.»
Flo et Nico sont donc évidemment ensemble actuellement, se proposent des ébauches de morceaux en jouant de la guitare, avant que la maison soit relouée en février avec un « format » se rapprochant un peu de la résidence, avec du temps pour faire les choses.
Maintenant, ça fait deux mois que les deux amis essayent de mélanger les idées de chacun et de tester celles-ci avec l’aide d’un enregistreur. Ils soulignent presque à l’unisson que la reformation sonne désormais comme une évidence. Nico en profite pour sortir sa guitare, et me jouer trois accords, afin de démarquer les nouvelles compositions vis-à-vis de leur dernier album, duquel ils veulent s’éloigner : « La seule chose qu’on s’est dit c’est qu’on ne voulait pas refaire un album comme slow. On est parti dans un délire un peu trop technique, ça jonglait, y’avait des mises en place difficiles à enregistrer et à se souvenir. Fallait vraiment faire attention, alors que sur les deux premiers on pouvait envoyer, y’avait des trucs faciles. Dans Slow on enregistrait en live et on faisait des fois 10/15 prises, alors qu’avec les autres, c’était 3 ou 4.»

Nico et Flo se montrent lucides. Les années sont passées, la nostalgie sera présente pour eux comme pour ceux qui ont déjà prêté une oreille attentive à SPORT. Les sujets abordés dans les paroles seront différents, même si l’énergie déployée sera la même qu’au début de l’aventure :

 « On a grandi, les paroles vont surement moins parler de la peur de grandir. Les thèmes ne seront pas les mêmes… ou alors comment transformer ces thèmes sur des problématiques de dix ans plus tard ? on ne va pas non plus essayer de faire les jeunes. Certains riffs portent une couleur parfois nostalgique, quand on a commencé SPORT on était pas mal angoissés. On avait des choses à se montrer. Aujourd’hui c’est toujours le cas, mais ça se fera probablement avec plus de détachement. »

Sport insiste sur son envie d’aller vers plus de spontanéité, de se détacher de certaines méthodes utilisées auparavant. Avec la maison à disposition, terminé les deux/trois jours en studio et l’homogénéité qui en ressort forcément. S’éloigner de « Slow », mais aussi être finalement libéré de la nostalgie de « Colors » apporte à SPORT une soif et une envie grandissante jours après jours.
Nico et Flo rassurent : « Là ce qu’on compose, c’est vraiment de l’Emo Punk. »

A l’arrivée de la quarantaine, les gars précisent que l’agenda doit être bien ficelé, et les projets bien déterminés : « On va represser Colors et Bon Voyage, on a proposé à pas mal de labels qui vont suivre l’idée. On a clairement un projet d’album qu’on prévoit d’enregistrer en avril, on est encore à quatre mois  et là il commence à y avoir du contenu. On a pas de dates de sortie, mais normalement l’album sera fini en mai. Il sera surement terminé à cette période, et sortira peut être à l’automne. » L’envie de faire les choses différemment n’est pas intervenue uniquement sur le sujet de la musique elle-même, mais aussi sur la manière de fonctionner du groupe. SPORT tente désormais de faire les choses avec un booker (Persona Grata).  En avançant ainsi, SPORT cherche à pouvoir se concentrer davantage sur le plaisir même de jouer, mais également à avoir plus d’opportunités pour accéder à des salles en France et à de nombreux festivals qui sont toujours aussi importants pour le groupe : « On a été super surpris quand on a fait la déclaration de réunion. On s’est pris quarante propositions de concerts, beaucoup de retours, on pensait que la scène était un peu moins active en étant moins dedans. » Le groupe repartira donc pour une tournée cet été, pour laquelle ils s’arrêteront probablement en Slovaquie, en Autriche… L’album ne sera sûrement pas sorti, mais l’occasion de jouer de nouveaux morceaux sera bien présente. Si des opportunités se présentent avant, SPORT reste ouvert à la discussion. Les mois de mai et juin sont évoqués dans la discussion, avec quelques propositions de festival en Italie. Des petits week-ends sont alors envisagés. 
Au sujet de la sortie des albums, le sujet est encore en réflexion : « Ça nous ferait bizarre de perdre le contrôle sur les disques, mais ça serait peut-être une économie aussi parce qu’on a nos trucs dans nos vies.. »

sport concert 2

Avant de se quitter, je n’ai pas pu m’empêcher de demander si la reformation était vue comme un projet temporaire ou non. La réponse est restée assez floue, comme celle que j’avais obtenu pour l’interview lors de la séparation et recopiée en haut de cet article. Ça m’étonne à moitié. Comment prédire ce genre de choses dans une aventure humaine aussi riche ?
Nico me répond : « On aura plus le droit de dire qu’on se sépare. J’pense que si on s’arrête on dira … » « RIEN » s’empresse de terminer Flo, laissant les rires amener les dernières phrases :
« La prochaine fois, on sera peut-être un peu moins rédhibitoires et catégoriques sur le fait d’arrêter ou pas, on aura peut être moins besoin de le dire. » 

Aujourd’hui, la sensation d’un besoin vital s’est ressentie énormément pendant notre discussion. Les mots échangés m’ont transporté dans quelques mois, et il m’est déjà difficile de garder patience. Nico, lui aussi, se montre déjà tout chamboulé : 

«Réactiver et refaire vibrer ces cordes de ce qu’on faisait à l’époque… maintenant quand on joue les morceaux y’a une énergie qui vient de loin, ça fait partie de nous, on peut ouvrir la boite et se faire animer de plein d’émotions différentes. Elles sont existentielles, c’est sûr. »

— Propos recueillis par Arno